🎙️ La face cachée de l’adoption
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Cet article pourra également s’appeler Les secrets de l’adoption.
Quand on met un pied dans le monde de l’adoption, on se rend de choses auxquelles personne n’a été sensibilisé, ni nos parents (adoptifs), ni nous-mêmes, ni les associations ou organismes en lien avec l’adoption.
Alors quand j’ai découvert des facettes de l’adoption qui avaient un impact dans ma vie que je n’avais jamais estimé, j’ai tout de suite souhaité interviewer Anne Cath et Joohee pour en savoir plus.
Démystifier et conceptualiser le fait d’être adopté
Aujourd’hui, j’accueille Anne Cath et Joohee pour parler de concepts qui se cachent derrière l’adoption.
Je les ai découverte grâce à leur chaîne YouTube et j’ai été bluffé de découvrir tous les concepts. Certains m’ont permis de mettre des mots sur mon ressenti et d’autres de me poser des questions sur les droits des adoptés. Droits que je n’aurais même pas imaginés.
Leur projet est de sensibiliser l’adoption à un niveau plus macro, tout en évitant la vision binaire : adopter, c’est bien ou c’est mal.
Plan de l’interview de Anne Cath et Joohee, adoptées engagées, militantes et activistes
Cette interview de Anne Cath et Joohee dure 1h30. Afin de vous aider à vous retrouver dans tous les concepts évoqués, voici le plan :
- Présentation de Anne Cath et Joohee : 01:08
- L’adoption comme système : 02:10
- Comprendre pour mieux se reconstruire ? : 05:08
- L’abandon, un mythe ? : 11:40
- Flux migratoires et enjeux politiques de l’adoption : 17:00
- Le concept de l’adopté-phobie: 17:37
- Le concept du blanchiment ou l’éducation blanche de l’adopté : 22:10
- La gestion de la double culture : 30:25
- Tous les concepts : 36:34
- Les actualités d’Anne Cath, de Joohee et d’AdoptEcout : 36:59
Anne Cath, Joohee, qui êtes-vous ?
Je m’appelle Anne-Cath. Je suis née en 1987 au Sri Lanka. J’ai été adoptée par une famille blanche, en Bretagne. J’ai grandi en Bretagne dans une petite ville qui s’appelle Lannion. Ce qui s’est passé, c’est que je suis partie assez rapidement de ma famille parce que je n’ai pas
vraiment connecté avec ma famille. Grâce à ça, petit à petit je pense que ça m’a aidé beaucoup avancer vers une vision critique de l’adoption.
Moi c’est Joohee. Merci Sandra d’avoir penser à nous et de nous laisser la parole dans
ton média. Je suis née en Corée du Sud en 1982. J’ai été adoptée vers mes 1 an, par une
famille blanche française du Nord de la France. Dans la vie, je suis enseignante et j’ai eu
la possibilité de retourner vivre un an et demi en Corée du Sud de 2013 à 2015. ça a été vraiment une révélation à plein de niveaux. ça m’a permis aussi de changer ma vision de
de l’adoption.
Comment passe-t-on à une vision aussi radicale de l’adoption ?
“Radical” malheureusement c’est un terme qui est un petit peu péjoratif de nos jours. Je
le vois plutôt de manière positive puisque je le vois au sens étymologique, c’est-à-dire au
sens premier du terme : aller à la racine des choses, aller creuser et essayer
de comprendre comment fonctionne un système.
Je suis parvenue à cette vision radicale au contact d’autres adoptés que j’ai rencontrés en Corée du Sud, des adoptés américains et scandinaves qui avaient déjà beaucoup réfléchi sur la question.
Il faut savoir qu’aux États-Unis, il y a aussi ce qu’on appelle les Korean adoption studies qui existent.
C’est déjà tout un champ universitaire qui est travaillé au niveau sociologique.
C’est grâce à ces rencontres que j’ai que j’ai changé ma vision en une vision plus radicale de de l’adoption en tant que système.
[Réponse de Anne-Cath] Pour ma part, on va dire que c’est peut-être un peu différent de Joohee dans le sens où, depuis toute petite j’ai quand même assez ressenti le racisme.
Il y a quelque chose qui s’appelle le passing.
Le passing, c’est des personnes qui physiquement vont être plus ou moins proches des personnes blanches et qui ne vont pas forcément vivre tout ce qui est le racisme direct social. Par exemple, les insultes ou des choses comme ça. ça va passer un peu au travers. Je ne suis jamais passée au travers de tout ça. J’ai toujours vécu le racisme.
J’ai toujours eu conscience du racisme que je vivais.
Quand j’avais 10 ans, je suis partie au Sri Lanka pour la première fois.
je crois que à mes 10 ans ça m’a fait vraiment un déclic. Je voyais les gamines qui avaient mon âge.
Je crois que je ne me rendais pas vraiment compte du problème qu’il avait dans le sud et la relation qu’il y avait avec l’Europe. J’avais seulement 10 ans donc je pense que je ne pouvais pas le formuler comme je le formule aujourd’hui. Mais je pense que j’ai vraiment commencé à déconstruire tout ça dans l’enfance. Petit à petit, j’ai commencé aussi à me rapprocher des personnes racisées. J’ai commencé à me créer une conscience politique au niveau de l’antiracisme. Mais ce n’est pas passé que par l’adoption. c’est passé par plein d’autres choses, par exemple les violences policières. J’ai déjà vécu des violences policières. Depuis que je suis petite, je vis des violences policières. Je me fais encore arrêtée aujourd’hui.
Grâce à cette ouverture que m’ont fait les personnes racisées, que m’a fait l’antiracisme, ça m’a donné les bases pour pouvoir aussi créer une vision critique sur l’adoption.
Quand on commence à étudier tout ce qui est les systèmes de colonialisme, on voit qu’il y a vraiment beaucoup de parallèle entre le système de colonialisme, les systèmes de déplacement de personnes pendant le colonialisme avec le système d’adoption internationale. C’est le chemin que j’ai fait.
Qu’est-ce que ça veut dire être racisé, la blanchité, le passing ?
Le but de de nos vidéos c’était aussi de proposer des outils de réflexion différente de l’analyse de qu’on peut avoir pour l’instant, qui est une analyse très fermée de l’adoption internationale. C’est surtout une analyse qui est principalement menée dans les médias, dans les espaces de parole par des parents adoptants ou par des spécialistes. C’est regrettable qu’on ne laisse pas suffisamment la parole aux personnes adoptées.
Je considère qu’on a acquis une expertise de terrain. J’insiste sur le mot de terrain parce que c’est une expertise qui est ancrée dans un sol.
Je trouve que cette métaphore est intéressante quand on est adoptée. En général, on a été déraciné. on utilise souvent ce terme là pour parler de notre séparation avec notre pays d’origine, notre famille biologique. C’est intéressant de reprendre cette métaphore là, de l’ancrage dans un sol. Cet ancrage je le fais par toute mon analyse à travers l’adoption comme système. Je considère qu’au contraire les personnes, les spécialistes qui parlent des adoptés à la 3ème personne, qui parlent de nous comme des objets ont en fait une analyse qui est hors sol, qui est désincarnée. Je trouve ça intéressant de dire que nous les Adoptés, nous avons une analyse, une expertise incarnée et ancrée dans un sol. C’est pour ça que j’aime bien utiliser ce terme de “expertise de terrain” aussi pour dire qu’on arrive à s’ancrer quelque part.
Finalement, on arrive aussi à aller au-delà de notre expérience d’adopter qui n’est pas que qu’une expérience de traumatisme de de mal-être, etc. et qu’on arrive à développer une analyse systémique et globale de l’adoption.
Pour revenir un peu sur quelques trucs que dit Joohee, on a pris la décision d’être militante antiraciste. C’est vraiment une décision de vie qu’on fait sur certaines choses. L’antiracisme, ça ne s’applique pas juste sur l’adoption. Je pense qu’on touche vraiment l’antiracisme sur plein d’aspects de nos vies. L’adoption, c’est vraiment une partie de tout ça. Mais on va dire que c’est le chemin qu’on a choisi.
Coïncidence, on s’est connu grâce à ça mais on ne dit à personne que les personnes doivent suivre le même chemin que nous.
Il y a eu beaucoup de protagonistes, depuis les parents, depuis des associations en adoption, depuis même des représentants d’État, des psychologues qui ont beaucoup beaucoup parlé de nous mais qui ne nous ont vraiment jamais écouté.
Je pense qu’on essaie vraiment de commencer à ouvrir une porte en fait pour que la voix des adoptés soit un peu plus visibilisée.
C’est un peu la même histoire de la porte. On n’a pas de réponse absolue.
S’il y a des personnes qui se posent des questions, qui peuvent être des fois un peu perdues, comme on l’a été Joohee et moi, à un moment donné, on a été perdu, c’est donner plusieurs chemins pour que les gens puissent avoir quelques repères pour pouvoir un petit peu s’orienter quand ils commencent à se poser des questions sur certaines choses.
C’est pour ça qu’on explique aussi d’essayer de se détacher de la vision morale dans le sens où en fait on parle d’un système. On attaque personne au niveau personnel quand on parle de ces choses.
C’est le chemin qu’on a choisi mais il peut avoir complètement d’autres chemins. On essaie juste de donner quelques clés pour que les gens puissent aller un petit peu plus loin.
Ce qu’on propose c’est vraiment des pistes. C’est une lecture possible parmi plein d’autres, notamment la lecture un peu psychologique des identités des adoptés. Je pense que en tant qu’adopté, on met du temps. ça demande un vrai processus au niveau de de la prise de conscience de plein de choses : au niveau de notre identité, de la gestion de plein de problématiques. On est vraiment à des temporalités différentes. Je pense quand même que c’est pertinent de commencer à réfléchir au système de l’adoption comme système, avoir une analyse critique politique et décoloniale du système. Mon but ce n’est pas de rendre plus mal les gens. mais comme je disais tout à l’heure, c’est vraiment d’offrir des outils.
Quand les gens seront prêts, ils les auront à disposition. Si les gens ne sont pas prêts, il y a d’autres choses pour les aider. Il y a des groupes de paroles entre adoptées qui sont en train de se faire. Il y a des ressources. Dans ces cas-là plutôt trouver aussi un accompagnement peut-être thérapeutique quand on est vraiment dans le mal-être. C’est sûr que là pour ça, on n’a pas de réponse parce qu’on n’est pas sur ce plan là. On est sur un autre plan d’analyse.
Les vidéos sont vraiment pour un public qui est très très large. C’est clair qu’on peut avoir ce genre de public qui va regarder les vidéos. On parle vraiment vraiment du problème de structure qu’il y a derrière. On essaie de le mettre en avant là-dessus.
Est-ce que c’est mieux d’avoir des questions toute sa vie ou d’avoir une réponse même si elle peut être un peu douloureuse pour pouvoir passer à une étape d’après plutôt que d’être dans un questionnement continuel toute sa vie ?
Il y a des étapes qui sont dures à passer qui sont douloureuses parce qu’il y a beaucoup d’étapes qui font partie de l’adoption qui sont douloureuses. Je pense que ça ne s’applique vraiment pas à tout le monde. Pour ma part je préfère avoir une réponse même si la réponse doit être compliquée à digérer plutôt que de rester dans un flou toute ma vie. Je suis en contact avec pas mal de personnes adoptées. Il y a des personnes qui sont un petit peu choquées au début. Et il y a des personnes qui comprennent exactement tout ce qu’on est en train de dire donc.
Quelqu’un aussi qui commencerait à écouter nos vidéo et qui n’accepterait pas le message, NE continuez PAS à regarder le reste du contenu. On l’explique aussi dans l’introduction : de quoi on va parler pour ne pas que les gens rentrent dans des sujets trop durs et les préparer un peu pour la suite.
C’est vraiment un chemin parmi tant d’autres. Il y a des personnes qui ne vont pas se reconnaître là-dedans. Je peux comprendre qu’il y a des personnes qui peuvent être choquées par certains discours. Mais c’est la vision, c’est la critique antiraciste qu’on donne sur l’adoption.
Sur le traumatisme de l’abandon pour les adoptés
Il y a vraiment un problème d’analyse là-dessus parce qu’on voit un peu l’histoire comme si nos mères nous avaient abandonné. Je rejette l’utilisation du terme “abandon” parce que l’histoire de l’abandon comme on le montre dans les films à la télé, ça n’existe pas.
J’utilise le terme séparation dans le fait où il y a des causes à ce qu’une mère va donner en
adoption à son enfant. Dans mon cas, je suis du Sri Lanka, c’est encore un peu compliqué
parce qu’il y a les trafics au milieu, mais on va dire que selon les endroits, ça peut être pour
des situations où il y a des problèmes politiques à l’intérieur du pays. Il y a une guerre. Il y a des problèmes de pauvreté, des problèmes de famille. ça peut être plein de trucs.
Mais ça n’existe pas une mère qui donne son bébé pour l’offrir à des personnes blanches pour qu’il l’emmène en Occident pour qu’il ait une meilleure vie. Il y a quelque chose derrière tout ça.
Il y a beaucoup d’images que nos mères sont méchantes, nos mères biologiques sont méchantes. Nos mères seraient des prostituées. je dis prostituées depuis l’image négative qu’il y a sur la prostitution. vos mères seraient des prostituées, vos mères seraient des droguées.
Tous les problèmes sont liés à nos mères biologiques. Il y a beaucoup de rapport avec cette
analyse qui vient du fait de “ on t’a déjà sauvé de ton pauvre monde sauvage donc pourquoi tu te plains ?”
ça peut pas être eux le problème au milieu de tout ça.
Je pense que oui il y a aussi un truc un peu de responsabilité dans le fait si mon enfant est compliqué, non non non c’est pas moi, c’est forcément d’ où il vient. c’est forcément sa mère biologique. nous on a rien fait dans cette histoire parce que nous, on l’a sauvé de cette situation donc on ne peut pas être le problème à tout ça. je pense que c’est vachement lié à des trucs comme ça. tout ça c’est lié à des problèmes de racisme, au milieu et de la vision qu’on a sur le sud global ou sur nos mères biologiques.
Je pense que c’est vraiment lié à plein de choses qui sont en relation avec ça. Mais je pense qu’il y a vraiment une grosse erreur sur le terme de l’abandon et de lier tous nos problèmes psychologiques à une séparation avec la mère.
Comme on peut voir par exemple dans les groupes d’adoptés, j’entends très peu de personnes parler du fait qu’ils ont un trauma énorme avec la mère biologique. 90 % des déclarations qu’on peut lire dans les groupes d’adoptés, ils parlent de leurs parents adoptifs, quasiment tous. Donc le problème n’est pas où est-ce qu’ils allaient penser qu’il était.
Mais je pense que c’est lié à des choses qui sont en rapport avec ça. J’ai envie de dire que c’est aussi un acte parce que c’est un acte égoïste le fait d’adopter et que lié à ça.
Je vais utiliser un gros mot c’est multiscalaire. c’est-à-dire que c’est à plein d’échelles.
c’est à la fois un acte égoïste, c’est parce que dans les textes scientifiques, psychologiques, on dit que les enfants adoptés ont plus de problèmes.
c’est à la fois lié à une mythologie autour de l’adoption :
– il y a le mythe du Sauveur blanc,
– il y a le mythe de la vision misérabiliste d’un enfant qu’on va sauver,
– le mythe de l’orphelin.
Tout ça ce sont des récits fictifs qu’il faut déconstruire et qui nourrissent encore un système qui se qui est basé sur des inégalités nord- sud. Pour moi c’est un système colonial. J’en suis vraiment venue à cette idée.
c’est un système colonial l’adoption. Pourquoi ? Parce que les personnes qui adoptent baignent encore dans cette vision de supériorité, qu’avaient les colons à l’époque. Les colons occidentaux qui allaient coloniser les pays en Afrique, en Amérique latine, en Amérique tout court, parce que l’Amérique, c’est une colonie de peuplement, en Asie.
Cette mission un petit peu civilisatrice qu’on retrouve vraiment dans le système de l’adoption et dans le système de représentation qu’on a intégré de l’adoption et que les parents eux-mêmes ont en pensant sauver un enfant.
Donc dès que l’enfant ne convient pas, ne correspond pas à l’idée qu’il s’était faite, c’est-à-dire d’un objet qui peut être modelé selon leur leur vision des choses dès que l’enfant ne rentre pas dans cette case, ça va être problématique. Je rajouterai l’aspect capitaliste.
D’est-à-dire qu’il y a aussi le fait que c’est un business. Il y a de l’argent en jeu et à partir du moment où des parents ont mis quand même des milliers de dollars ou d’euros dans une adoption, ils sont en attente aussi. Ils sont en attente que l’enfant corresponde à leurs besoins parce qu’ils ont mis l’argent aussi quelque part.
Donc il y a ce truc assez malsain qui se joue aussi dans ce système à différents niveaux, à différentes échelles.
Adoption et flux migratoires
Vous parlez également dans vos vidéos des flux migratoires de l’adoption qui se passe du Sud vers le Nord
[Joohee] Excuse-moi, d’Europe de l’est aussi. Parce qu’on a tendance à oublier aussi qu’il y a des adoptés d’Europe de l’Est, mais il y a aussi une inégalité au sein même de l’Europe. Les pays d’Europe de l’Est, comme l’Ukraine, la Russie ou la Roumanie sont considérés comme inférieurs au niveau économique par rapport au pays d’Europe, d’Europe de l’Ouest. Pendant un moment, il y a eu des gros problèmes à ce niveau-là, de trafic d’enfants en Roumanie dans les années 90.
L’adopté-phobie
L’adopté-phobie est un un concept qui a été inventé par une Américaine, une adoptée américaine que j’ai rencontré en Corée du Sud.
Ça contrebalance l’idée que nous les Adoptés serions des privilégiés parce qu’on a souvent l’idée suivante :
“De quoi vous vous plaignez, vous êtes adoptés, on vous a offert une vie meilleure etc.”
L’adopté Phobie, ça vient contrebalancer ça. ça évoque tout un système de représentation et de pratiques qui vont infantiliser les Adoptés.
Ressources en lien avec ces thèmes
Chaîne Youtube de Anne Cath et Joohee : Adoption Internationale
Adopté-phobie : en fin de l’article suivant : « Asiatique et adoptée, une double invisibilité«
L’association AdoptEcout active sur Instagram : AdoptEcoute
Le livre de Joohee Bourgain : « L’adoption internationale Mythes et réalités«
Et le Sommet Virtuel des Adoptés pendant lequel Anne Cath anime un groupe de paroles orienté sur le racisme et réservé aux personnes adoptées : Replay Sommet Virtuel des Adoptés 2023
Un grand merci Anne Cath et Joohee pour leur temps.
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